- PARTI COMMUNISTE ITALIEN
- PARTI COMMUNISTE ITALIENPARTI COMMUNISTE ITALIEN (P.C.I.)Celui qui devint «le plus puissant parti communiste du monde non communiste» avait été fondé au congrès de Livourne en 1921. Le Parti communiste italien (P.C.I.) ne regroupe d’abord que la minorité ultragauche du Parti socialiste dirigé par Amadeo Bordiga et le groupe qui, autour d’Antonio Gramsci, avait publié à Turin la revue Ordine nuovo . Aux élections de mai 1921, il obtient seize sièges de député. Mais il n’est pas en mesure de s’opposer à l’avènement du fascisme. Au congrès de l’exil à Lyon (1926), la ligne sectaire suivie par Bordiga est condamnée; Gramsci puis Palmiro Togliatti succèdent à Bordiga au poste de secrétaire général du parti.Très fidèle à l’internationalisme prolétarien et à Moscou (contrairement à une idée reçue), le P.C.I. reste parfaitement orthodoxe. Mais il reconnaît depuis l’origine la nécessité d’une «voie italienne vers le socialisme», et les analyses profondément originales de Gramsci, mort en prison en 1937, placent sa spécificité dans son insertion dans un pays catholique. C’est ce qu’a proclamé avec lucidité Togliatti, l’un des principaux dirigeants du Kominform sous le pseudonyme d’Ercoli, dès son retour de Moscou où il était réfugié pendant la guerre. Toutefois un désaccord existait entre Togliatti et Gramsci sur le «niveau d’alignement» à observer à l’égard de la politique soviétique. Gramsci, à la fin de sa vie, semble bien avoir perdu confiance dans le «centre mondial».Durement éprouvé par la répression, le P.C.I., grâce à son action dans la résistance au fascisme, passe de dix mille membres en 1943 à cinq cent mille en 1945. Adjoint de Togliatti, Luigi Longo, alors chef des partisans en haute Italie, réorganise remarquablement l’appareil. Dès septembre 1944, renonçant à toute stratégie insurrectionnelle, Togliatti réclame la coopération avec les catholiques et la «marche légale vers le pouvoir.» Pour parvenir à ses fins, il s’allie avec le socialiste Nenni puis entre dans le gouvernement De Gasperi (démocrate-chrétien). Ministre de la Justice, Togliatti ne repousse pas les fascistes repentants et réduit l’ampleur de l’épuration. Il accepte la nouvelle Constitution fondant une démocratie parlementaire à aspirations sociales. En mai 1947, à la faveur de la guerre froide, le P.C.I. est pourtant chassé du cabinet De Gasperi. Isolé, menacé d’être enfermé dans un ghetto, il confirme son obsession de l’alliance nécessaire avec les catholiques et s’inquiète du glissement à droite des partis italiens (1948-1952).«Prêt à toutes les confrontations», recherchant avec persévérance les «convergences d’intérêt» (Longo), accueillant favorablement l’expérience de centre gauche en 1962, très inquiet de son échec apparent (1972), le P.C.I. gagne des sympathies en proclamant son «désaccord» (dissenso ) après l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968. Dès son VIIIe congrès (1956), il définit la «voie italienne vers le socialisme», qui implique une «candidature au gouvernement» (Togliatti). Accusé sur sa gauche (groupe du Manifesto, exclu du parti en 1969, gauchistes de Lotta continua et de Potere operaia) d’oublier la «vocation révolutionnaire du parti» et de verser dans le «crétinisme parlementaire», il assure au XIIe congrès (rapport de Longo à Bologne en 1969) que la société doit être «pluraliste, non centralisatrice et non bureaucratique», et que le socialisme en Italie «sera quelque chose d’une qualité différente des expériences connues jusqu’à présent correspondant pleinement aux traditions et à la volonté de notre peuple». En 1973, le nouveau secrétaire général du P.C.I., Enrico Berlinguer, tirant la leçon des événements du Chili, affirme avec plus de force que jamais l’adhésion de son parti à une orientation réformiste, et fixe comme objectif la réalisation d’un grand «bloc historique» comprenant catholiques et communistes. Simple adresse tactique? La permanence du thème dans toute l’histoire du P.C.I. ne permet pas de l’affirmer. Nullement «révolutionnaire», recueillant une bonne part de la tradition illuministe et laïque en terre d’Église, le P.C.I. est original, dans la mesure où son refus de principe de se couper de Moscou le lui permet.Le P.C.I. déclare en 1973 environ 1,5million de membres inscrits, dont 54 p. 100 dans le Nord, 26 p. 100 dans le centre de la botte, 19,5 p. 100 dans le Sud et les îles. Il possède ses places fortes dans les «régions rouges», gouverne dans le cadre du régionalisme italien l’Émilie-Romagne, la Toscane, les Marches et l’Ombrie. Il s’articule en plus de 100 fédérations et plus de 10 000 sections, près de 25 000 cellules, 74 000 permanents membres de l’appareil. Il recueille environ 30 p. 100 des suffrages aux élections générales, et il est composé pour près des deux tiers d’ouvriers et de paysans. Un militant sur cinq est un intellectuel. Bien que le gauchisme lui prenne des voix, le recrutement du P.C.I. ne se tarit pas. Sans doute connaîtra-t-il un plus grand nombre d’adhérents (près de 1,8 million en 1977), mais, en ce milieu des années 1970, le P.C.I. est, politiquement, à son apogée. Les élections régionales de 1975 enregistrent sa montée en puissance. Aux législatives de 1976, provoquées par la chute du gouvernement Moro, il triomphe avec 34,4 p. 100 des voix.Non sans paradoxe, alors que la consultation vient d’accentuer le schéma politique de bipolarisation, le P.C.I. voit le moment venu de faire passer dans les faits le «compromis historique» cher à Berlinguer. De 1976 à 1979, par sa neutralité, parfois par son soutien parlementaire, il assure l’existence d’un gouvernement démocrate-chrétien homogène. Loin de lui apporter en retour la participation aux affaires qu’il escompte, cette position floue l’éloigne dangereusement de sa base ouvrière et fait le jeu du P.S.I. L’expérience prend fin en 1979, et le P.C.I. durcit son action en même temps que d’autres révisions s’imposent: abandon de l’eurocommunisme (1980), éloignement grandissant par rapport à l’U.R.S.S. (question afghane et polonaise), débats sur une «alternative de gauche» avec le P.S.I.L’essentiel est à venir. Depuis la fin des années 1970, la tendance lourde dans laquelle s’inscrivent les scores électoraux du P.C.I. exprime une érosion progressive. En 1983, l’effondrement de la Démocratie chrétienne aux élections législatives précipite le jeu et ouvre le gouvernement aux socialistes, devenus indispensables à toute majorité. Désormais ceux-ci vont représenter une menace croissante pour le P.C.I., qui en 1987 n’obtient que 26,6 p. 100 des voix. Son électorat traditionnel s’est embourgeoisé, la jeunesse ne se reconnaît plus en lui, les effectifs s’amenuisent. Le P.C.I. paie aussi la disparition d’Enrico Berlinguer (1984), dont les successeurs Alessandro Natta et, à partir de 1988, Achille Occhetto, n’ont pas le charisme. Aux élections locales de 1988, P.C.I. et P.S.I. se retrouvent au coude à coude. À la fin de 1989, sous le vent des grands bouleversements qui interviennent en Europe de l’Est, Achille Occhetto décide la disparition du Parti communiste en tant que tel. Celui-ci se transforme, au début de 1991, en Parti démocratique de la gauche (P.D.S.), non sans provoquer la scission d’une minorité emmenée par Sergio Garavini, qui fonde à son tour Rifondazione comunista.
Encyclopédie Universelle. 2012.